mercredi 7 mai 2008

La suggestion en court



La suggestion en court: le Jeudi 29 mai à Sciences-Po, sélection de courts-métrages en collaboration avec la FEMIS.

À partir d'un projet (in)esthétique, tendre un pont vers le spectateur, faire sens, transmettre. Si le long-métrage permet de réaliser ces "missions" de manière relativement simple, avec la mise en place d'une narration plus ou moins élaborée, d'une intrigue sans contraintes de lieu, de temps ou d'espace et des dialogues aux potentialités infinies, il en va autrement pour le court-métrage. Couplé le plus souvent à des moyens très limités, le court-métrage puise dans sa limitation temporelle toute sa puissance: comment, en quelques minutes, réussir à toucher le spectateur, lui faire passer un message, qu'il soit artistique ou politique, et imposer sa vision d'auteur avec la même puissance qu'un long-métrage ? Comment faire jaillir de ces contraintes toute la créativité nécessaire pour rendre intéressante une expérience si éphémère?

En obligeant les créateurs à jouer sur l'invisible, les moindres détails, faute de quoi leur oeuvre serait condamnée à l'oubli, ce format rejette de façon presque organique la facilité de l'explicite. Donner du sens aux choix d'éclairage, à chaque élément du décor, aux regards traversant l'écran: voilà quasiment des obligations pour le créateur s'il veut égaler les oeuvres longues et donner vie à son film.

La suggestion, l'implicite et le symbolique se retrouvent donc naturellement au coeur de nombre de courts-métrage, et nous espérons que cette petite sélection vous en convaincra: le court-métrage n'est pas le parent pauvre du format long, il est, dans l'idéal, son intensification paroxystique.

samedi 3 mai 2008

Rajoy y Zapatero


Il y a parfois des phénomènes qui nous résultent incompréhensibles, qui dépassent notre entendement et provoquent chez nous un désespoir non feint, un vrai abattement. Il est difficile de décrire ce que l'on ressent, difficile d'en parler, difficile de les cerner. Mais la sensation vous prend au ventre, vous le retourne, angoisse. On en resterai pantois, on est interloqués par ce qu'il arrive, et on y peut rien. C'est peut être aussi cette sensation d'impuissance qui contribue au désespoir. Car ce genre d'événements prend parfois une dimension si importante qu'il n'est rien que nous puissions faire pour l'influer. Ou alors c'est ce que nous pensons.

Cette sensation, c'est celle qui vient de me prendre au corps alors que je lisais El Pais (dont je commenterais certainement la qualité dans un autre billet). Sur les 98 pages du journal (hors suppléments), ils en ont dédié une dizaine aux élections qui auront lieu le 9 mars, le même jour que nos municipales. Y sont commentés les derniers sondages (empate tecnico entre les deux candidats principaux), les chiffres de l'économie et du terrorisme, ornementés d'un certain nombre d'articles d'analyse. On y apprend, ou pas, que la situation économique du pays a connu une amélioration encore plus importante que sous les législatures passées, que la situation de l'ETA est tout simplement catastrophique selon un rapport des RG espagnols, que les quatre dernières années ont été celles où le nombre de morts a été le plus faible depuis la transition, que lorsque le candidat du PP Rajoy était ministre de l'intérieur (de 2000 à 2002), il y a eu 38 morts (contre 4 entre 2004 et 2008), que Zapatero a tenu toutes ses promesses électorales, que Rajoy se fait passer pour le candidat de ceux qui « mouillent le maillot », lui qui a plus de 2 millions d'euros dans ses comptes courants...
tous ces nouveaux faits se rajoutent à ce que l'on savait déjà: qu'alors que Zapatero avait soutenu unilateralement toutes les initiatives d'Aznar en termes de terrorisme, le PP a tout fait pour pourrir la situation (Rajoy en arrivant à un « vous faites honte à nos morts )...

en vient une question simple, alors que Rajoy a une vraie chance de gagner: what's goin' on??

Salvador et culture française

Une chanson douce

Bon, Henri Salvador est mort. Et facebook est resté muet, alors que ça avait été l'orgie de groupes pour la mort de Carlos, quelques jours auparavant. Étonnant, enfin je suppose: moi je n'ai connu ni l'un ni l'autre. Mais Salvador, j'en avais beaucoup entendu parler alors que Carlos là, quedal. Je me dis que c'est à cause de la tendance à la dérision la plus totale qui règne sur Facebook. La mort du gros, ça fait marrer, le mec de 90 ans...

Résultat, j'ai téléchargé tout le répertoire de Salvador sur limewire, histoire d'avoir une idée du personnage. Confirmation, à part le lion est mort, je connais pas. Même une chanson douce, le truc aux paroles douteuses là: « il pris la biche dans ses bras, la petite biche sera toi si tu veux ». Mouais.

En parlant de téléchargements, la riposte graduée vient d'être adoptée et si j'ai bien compris, je risque d'avoir dans les 24 heures un mail de ... de qui? de la CNIL, du ministère de l'intérieur, de mon commissariat? Bon bref, je vais me faire taper sur les doigts, et je crains que ce post ne m'aide pas. En effet, malgré mon super pseudo-de-la-mort-qui-tue et qui me rend incognito, les législateurs ont décidé que mon adresse IP n'était pas une « information personnelle » et qu'elle pourrait donc être utilisée afin de m'identifier (cherchez l'erreur) lors d'un procès. Et ce, alors que la CNIL vient de dire le contraire. Youpi. En gros, l'ordre est de retour sur internet, et c'est pas la joie. Moi, l'internet, j'ai connu ça très tôt pour mon âge, et j'ai eu la chance de profiter de cet immense espace de liberté avant que les moralisateurs ne débarquent. On parle souvent de Napster comme symbole de cet âge d'or. Mais Napster, c'est un symbole pour Geek, c'était à se tirer une balle tellement c'était compliqué. Justement, c'est tout le contraire de ce qu'était sensé représenter internet à cette époque. Non, les vrais symboles d'un internet ouvert à tous, basé sur la coopération et la liberté, un vrai bordel d'anarchistes mais lisible quoi, c'était Audiogalaxy et Kazaa. L'un puis l'autre. Audiogalaxy, parce que c'était un site à la charte graphique extra-agréable qui ressemblait comme deux goûtes d'eau aux sites des Majors, où il suffisait de taper le nom de la chanson et de cliquer dessus pour la télécharger. Gratuitement, au nez et à la barbe de tous, et ce grâce à la mise à disposition des bandes passantes des utilisateurs. Le kiffe. Je me souviens encore de l'angoisse qui m'a pris lorsque j'ai téléchargé ma première chanson. Je devais avoir 11 ans, et j'ai du l'avouer à mes parents tellement j'avais mal au ventre. Mais ils n'ont rien dit, je pense qu'ils ne savaient même pas de quoi je leur parlait. Résultat, c'est vite passé.

Aujourd'hui, les plateformes de téléchargement illégales doivent se cacher, reprendre des formes impossibles, des noms inaccessibles, les utilisateurs partageux se sont envolés au profit des occasionnels qui ne partageraient leur bande-passante pour rien au monde: résultat, l'offre se réduit drastiquement et les autorités veulent porter le coup final. Moi, du haut de mes 18 ans, je dis merci à tous ceux qui ont participé à cette aventure, qui m'ont permis de sortir du tryptique Backstreet Boys-Aqua-Lorie pour découvrir une autre forme de culture, au nez et à la barbe des ayants droit mais pour mon plus grand bonheur et celui des groupes que j'ai découvert (dont j'ai souvent acheté ensuite les CD).

Au prochain numéro, la justification de ce comportement scandaleux.

Ennui et MCM

Lorsque je rentre dans mon QG lors d'un week-end ou de vacances, je passe inévitablement par la case MCM top.

Vestige d'un temps où je m'y ennuyais beaucoup, cette habitude m'est restée et je m'amuse à disséquer les clips des grandes stars. Curieusement, ce sont quasiment toujours des femmes. Je pense que ça a véritablement commencé avec Shakira, pour laquelle j'ai fait une véritable généalogie, cherchant en ses vidéo et chansons les récurrences, tentant de différencier ce qui venait d'elle et du directeur, de trouver les grandes lignes de sa stratégie en termes d'image... j'en ai tiré une longue analyse que je vous épargnerai ici. Aujourd'hui, je me suis attaqué à Alizée, le clone européen de Britney Spears en réussi. Même profil initial, même évolution vers un registre plus acide, mais différence de taille: l'une a su garder son public initial et cette schizophrénie si rentable, tandis que l'autre a sombré dans les travers que l'on sait.
Cette mise en perspective est toujours intéressante, tant elle permet de réaliser à quel point les ficelles du marketing sont grosses et universelles: on tente de nous vendre un produit formaté à la racine, dont le résultat final varie un peu en fonction du talent de l'interprète et de l'écrivain, mais qui reste facilement identifiable à un genre, un type bien précis: la spécificité semble bien peu rentable, et je crains que la scène pop française n'ait pas su se renouveler à partir de ce formatage, comme a su si bien le faire le cinéma américain, qui nous offre chaque semaine sont lot de super-productions risquées, que ce soit en termes de scénario ou de réalisation. Je ne vois tristement pas la même chose pour la pop.

La culture française, me semble-t-il, galère un peu de ce côté là: nous avons notre Christophe Maé, Jack Johnson francophone, notre flopée d'Alizée et de Lorie, nous avons eu nos boys-band lorsque le concept avait du succès... heureusement que la scène éléctro permet au pays d'être l'avant-garde musicale mondiale. Mais Mister Nuts saura bien mieux en parler que moi.